Le fornicateur (extrait) Depuis ce temps j'ai voyagé Et j'ai volé dans les vergers Les fruits mûris pour d'autres bouches J'ai vu des villes et des ports Le soir il faut bien qu'on se couche J'ai dormi souvent chez les morts Et souvent le long des chemins Aux vivants j'ai tendu la main Mais le pire ce sont les femmes Il y a des femmes au monde Assez que l'on en soit heureux Je parle pour les amoureux Dont la mémoire est une ronde Il y a des femmes assez Pour que l'on puisse s'en lasser Mais moi chaque fois je m'étonne Soit le printemps ou soit l'automne Croyez-moi ne me croyez pas Je remets mes pas dans leurs pas Chaque femme est une fenêtre Par quoi me semble reconnaître Un soir ce qui fut à jamais Louis Aragon (1963) |